samedi 25 mars 2017

Le coeur de la montagne


Il y a une dizaine d’années, mon enseignante tantrique préférée, que je considère comme ma mère spirituelle, m’a envoyé dans le bois à la recherche d’une intention de vie. Qu’est-ce donc que j’étais venu faire sur cette planète ? Vaste question. Après un moment de profonde perplexité à errer dans la forêt laurentienne, j’ai eu une vague intuition. Je me suis rappelé d’un de mes romans de science-fiction préféré, Le troupeau aveugle de John Brunner, dans lequel des écologistes enragés tagguent partout sur les murs un slogan qui m’avait frappé :

La terre redeviendra un jardin

D’un coup, tout mon passé militant m’est remonté et j’ai pensé : oui, bien sûr, c’est cela mon intention de vie ! C’est avec ça que je suis arrivé ici, le désir violent de contribuer à ce que nous retrouvions la voie de la vie naturelle. Ce désir fou d’un autre monde, d’une autre vie, qui m’a rendu révolutionnaire à l’adolescence, et qui m’a poussé plus tard à émigrer au Québec où la nature sauvage est encore bien vivante. C’est cette énergie aussi qui m’a jeté dans la quête spirituelle...

Et donc, j’ai eu le sentiment que la lumière se faisait en moi, que tout d’un coup je savais pourquoi je marchais sur terre. J’en ai été tout agité mentalement pendant un temps, et puis il y a un grand silence qui est retombé en dedans quand soudain, une étrange impression m’a assailli : c’était comme si les arbres s’étaient rapprochés et se penchaient sur moi en murmurant quelque chose. J’ai tendu l’oreille, faisant encore plus silence à l’intérieur pour entendre ce qu’ils pouvaient bien me dire, tout en me disant bien sûr que c’était n’importe quoi : à part dans le Seigneur des Anneaux, quand donc a-t-on entendu les arbres parler ? Mais ce que j’ai entendu m’a secoué. 

Un chuchotement très doux a pris forme en dedans et m’a dit :

-     Non, non, tu n’as pas encore compris… La terre n’a jamais cessé d’être un jardin !

J’ai sursauté. Ce n’était pas moi qui pensait cela. C’était tout le contraire de tout ce que j’avais toujours cru, toujours pensé, des croyances de base sur lesquelles étaient fondée ma personnalité d’anarchiste revendicatif et contestataire. J’ai même protesté intérieurement, invoquant la pollution et toutes les blessures que nous, les êtres humains, infligeons à la nature. J’ai pensé aussi aux guerres sans merci auxquelles nous nous livrons, avec leur cortège de destructions qui n’épargnent pas la nature, et aux univers artificiels que nous nous sommes construits dans les villes que nous habitons. Mais la voix a poursuivi, répondant directement à mes arguments :

-   Ce n’est qu’une petite couche de crasse mentale. La nature, en-dessous, est inviolée et reprendra ses droits…

L’image m’est venue à l’esprit d’une petite couche de suie recouvrant des millénaires de vie patiente, et j’ai soudainement été envahi par une grande paix. Tout s’est tu, en dedans comme au dehors. C’est avec une joie presque enfantine que je suis retourné voir ma mère spirituelle. Mon intention de vie était claire. Il s’agissait simplement de vivre cette paix, cette joie, et de retrouver le chemin qui conduit à ce que j’ai été amené par la suite à désigner comme le Royaume. Au fond, le fameux Royaume des Cieux n’est pour moi rien d’autre que la grande nature souveraine, la « nature naturante » dont nous parlait Spinoza ou encore le magnifique Corps de Dieu que nous avons toujours sous les yeux. Il suffit de lever les yeux vers le ciel et de contempler les étoiles pour reconnecter à une nature que nous ne pourrons jamais violer, et dont l’immensité nous dépasse. Tant que je m’énervais et me croyais justifié d’ajouter à la violence du monde au nom de la paix que je disais rechercher, je ne faisais que m’en éloigner. Il a fallu que les arbres m’arrêtent pour que je réalise ma bêtise. 

Cette compréhension a changé ma vie.

Quant à spéculer sur ce qui a effectivement parlé ce jour-là, je ne m’intéresse guère à cette discussion. Mes amis psychologues peuvent y voir une projection de l’inconscient, cela ne me parait pas très convainquant et tout au plus un peu réducteur, mais certainement rassurant pour eux. Une des caractéristiques du contact avec l’inconscient, c’est qu’il nous surprend. On constate : ce n’est pas « moi » qui ait pu penser cela ! Si ce n’est moi, c’est donc Soi, dira-t-on… mais ayant dit cela, on n’a rien dit à moins que l’on se serve d’un concept du Soi pour vite refermer le couvercle sur le mystère. L’inconscient, si on ne tombe pas dans le piège d’en faire un concept psychologique qui nous permet de tenir à distance la réalité de l’inconnu en nous, ce n’est jamais que ce qui est en dehors du champ de notre conscience. Ce n’est pas nécessairement inconscient en soi, cela peut être tout à fait conscient, peut-être même beaucoup plus conscient que nous. En Orient, on désigne cette intelligence que l’on constate souvent dans les rêves comme étant la conscience des profondeurs.

Disons donc simplement que c’est un rêve que j’ai vécu là : un rêve éveillé. Et dans mon rêve, les arbres parlent et le monde est encore magique. Rien n’interdit de penser qu’à un certain niveau de profondeur de la psyché, dans les couches les plus universelles de l’inconscient collectif, nous communiquions avec les arbres, les pierres, les animaux. En fait, beaucoup de gens vivent ce genre d’expériences qui rejoignent la vision ancestrale de notre relation intime avec la nature. Ainsi, dans les cultures chamaniques, notre humanité s’enracine dans une âme minérale, une âme végétale et une âme animale. Il n’y a que notre culture intellectuelle occidentale pour vouloir croire à toute force que nous soyons séparés de la Grande Vie, et peut-être est-ce là notre plus grand malheur, la source de notre déracinement – une maladie de l’âme qui nous rend souvent bêtes et arrogants envers tous ceux qui pensent différemment, c’est-à-dire en particulier les enfants et ces « primitifs » qui nous ont précédé de quelques dizaines de milliers d’années sur terre. Je préfère me tenir avec ces derniers.

Mais pour ma part, je me réserve le droit de ne simplement pas savoir et de laisser tout ouvert, car finalement, peu m’importe. Savoir, ce serait affirmer que le rêve de ceux s’en tiennent à la rationalité est faux, et cela ne m’intéresse pas d’entrer dans ce genre de discussions en forme de : mon rêve est plus vrai que le tien, plus réel. Je préfère rêver et laisser les autres rêver, au moins puis-je espérer goûter à quelque lucidité dans mon rêve.

Ken Wilber a souligné que, dans la critique de la rationalité réductrice qui prétend savoir, il y a une immense différence entre une vision pré-rationnelle, c’est-à-dire enfantine et qui se fonde sur la croyance, et une approche transrationnelle[1] qui reconnaît et dépasse simplement les limites de la raison en acceptant de ne pas savoir, d’aller dans le non-savoir. Jung a émis une distinction similaire en se moquant un peu des personnes qui veulent tout comprendre d’une façon littérale et ne sont pas capable de pensée symbolique, le symbole étant une image qui renvoie à l’inconnu. Je développerai ces idées une autre fois car elles sont fondatrices d’une approche des questions spirituelles trop rare et cependant tout à fait nécessaire à notre époque, approche que je définis comme tenant de l’agnosticisme radical. Au-delà du croire et du savoir, la voie qui s’ouvre est celle du non-savoir dans l’ouverture au mystère, pour danser avec lui puisque le mystère est vivant.

Mais pour l’instant, c’est donc un beau rêve dans lequel je vous invite à me rejoindre – il y a de la place pour tout le monde dans ce rêve, et plus on est de rêveurs et de rêveuses, plus on rit.

Joyeusement.

En effet, depuis cette rencontre avec le peuple des arbres et sa sagesse, j’ai observé que je ne suis plus jamais seul. Partout, même dans l’environnement le plus bétonné, j’ai des complices qui se présentent sous forme d’arbres ou de petites plantes, d’animaux domestiques ou d’insectes. C’est jusqu’à la caresse du vent et le scintillement des étoiles qui reconduisent à la nature, toujours présente. Et puis il y a les enfants, qui marchent dans le Royaume et sont encore dans l’Ouvert, comme le disait Rilke[2], avant que notre éducation ne les retourne, n’atrophie leur âme. La nature vivante est là aussi sous les grands discours et les costumes urbains, car que nous le voulions ou non, nous sommes des corps, nous vivons dans une animalité la plupart du temps inconsciente. Comme le disaient mes amis les arbres : finalement, la fameuse civilisation, ce n’est qu’une toute petite couche de vernis qui saute facilement (voir quelques épisodes récents de barbarie civilisée), et souvent, il faut bien le dire, de crasse mentale...

Mais revenons donc à mon rêve éveillé. Pour parler d’un rêve, justement, qui lui a donné un prolongement majeur quand il m’est venu quelques dix-huit mois après cette balade en forêt. Je m’étais couché un peu désespéré et en grande colère devant un jeu de pouvoir que je voyais à l’œuvre depuis longtemps dans ma vie professionnelle et qui m’atteignait alors dans mon estime de moi-même, me faisant douter d’être jamais capable de « parvenir à quelque chose ». Le rêve m’est d’abord apparu comme merveilleusement compensatoire de ce désespoir et de cette colère avant de m’emmener bien plus loin :

Je suis introduit dans un espace merveilleux. Je me promène dans la nature et je vais pour prendre une photo d’un lac. Je me baisse pour prendre la photo au ras de l’eau et je remarque alors des petites statuettes indiennes (d’Inde) sur le bord du lac. Je suis surpris car on ne les voit pas quand on est debout. Je continue ma promenade et je remarque progressivement que toute la nature environnante est aménagée comme une véritable maison. Je passe de pièce en pièce, je vois des chambres, une salle à manger, avec émerveillement devant le fait que tout participe : tels arbres forment une porte, la roche un meuble, etc. Je m’y sens chez moi.  Je m’installe, je profite du confort des lieux…

Plus tard, je sors de la forêt avec quelque chose à manger que j’ai trouvé dans la cuisine de la maison merveilleuse et que je veux partager avec un groupe de femmes autour d’un feu. Ce sont des quenelles que je mets à cuire sur le feu. Survient alors un homme cravaté, très énervé et verbomoteur, qui nous prend à partie en déclarant : « vous savez ce que racontent les Amérindiens par ici ? Ils disent que celui qui trouvera accès au cœur de la montagne vivra une vie d’abondance ! Quelle idiotie… » Il éclate d'un rire cynique tandis que je reste coi en me disant en moi-même : c’est donc cela, j’ai trouvé l’accès au cœur de la montagne ! Je ne sais pas quoi lui répondre, je le laisse rire.

Je me suis réveillé en pensant aux paroles du Tao-Të-King :

Quand l’homme noble entend parler de la voie, il l’embrasse avec zèle.
Quand l’homme moyen entend parler de la voie, il la discute, il en prend et il en laisse.
Quand l’homme inférieur entend parler de la voie, il éclate de rire.
S’il ne riait pas, ce ne serait pas la voie.

J’ai déjà parlé ailleurs[3] de ces trois sortes d’hommes décrits dans l’aphorisme de Lao-Tseu, qui correspondent à la distinction qu’établissaient les gnostiques entre pneumatiques, psychiques et hommes concrets. Le terme « inférieur » est mal choisi par les traducteurs car toute notion d’échelle et de supériorité est contraire à l’esprit du Tao-Të-King; il s’agit plutôt de ce que le Yi-King désigne comme « le petit homme » qui ramène tout à sa mesure, encore une fois littérale et concrète. Une des façons de reconnaître ce petit homme, c’est son obsession du profit et de l’utilitarisme : il veut tout exploiter et dominer. Il ne s’intéressera à la nature et à l’inconscient que s’il peut en tirer un bénéfice. Et qui parce qu’il marche main dans la main avec le Prince de ce monde, il se trouve bien souvent en situation de pouvoir, pour le plus grand bénéfice spirituel des autres. Car s’il ne riait pas et n’était pas aveugle aux richesses de la voie, ce ne serait pas la voie !

J’ai interprété ce rêve, mais comme tous les grands rêves, il n’en finit pas de déployer ses richesses et de me guider. C’est un rêve qui continue de me montrer le chemin. Ainsi que je le disais, j’y ai d’abord vu une compensation extraordinaire à la mesure du désespoir et de la colère dans lesquels je m’étais endormi, qui venait me rassurer en me parlant des richesses intérieures que j’ai trouvées dans mon cheminement. Le désir de capturer une image de l’inconscient, ici associé au lac de la tranquillité intérieure, m’amène dans le rêve à me baisser assez bas pour constater un premier miracle : je vois les symboles spirituels et les productions de l'inconscient, du divin qu’on ne voit qu’en ne se courbant assez bas. Cela renvoie à une histoire juive que Jung affectionnait, dans laquelle un rabbin était interrogé sur le pourquoi il n’y a plus de nos jours de grandes visions et de prophètes, et qui répond que plus personne ne se baisse assez bas…

Puis je réalise dans le rêve que la nature est une demeure, une structure psychique (maison) ouverte et vivante, que je peux habiter dans ma nature, et que tout y participe pour me donner un habitat. Il s’agit autant de la nature intérieure que de la nature sauvage extérieure; il n’y a pas de séparation dans la nature. C’est un endroit merveilleux, un sanctuaire naturel auquel j’ai accès. C’est chez moi. Il y avait là, à l’évidence pour moi, une référence à la vision que j’évoquais en début de cet article, et au rapport à la nature qui s’est instauré dans ma vie depuis lors. Puis, après un temps à profiter de cet espace, je sors donc du bois avec de quoi nourrir l’âme, mais il faut cependant le faire cuire, le rendre digestible. Et c’est avec des femmes que je vais le partager, c’est-à-dire avec le féminin en moi mais aussi dans la perspective de la restauration du Féminin sacré auquel je consacre mes travaux.

Il n’est pas anodin non plus que ces femmes soient en cercle car j’ai commencé à développer mes cercles de rêves dans les années qui ont suivies. Le cercle est aussi un symbole évoquant la présence du Soi, et selon moi, la forme de travail collectif nécessaire pour notre époque car non hiérarchique. Il y avait sans doute une allusion sexuelle à la virilité psychologique dans les quenelles (en français de France, le sexe masculin = la queue), qui dénotait avec humour une certaine immaturité sur ce point. Ce symbole quasi-phallique offert en partage pouvait aussi signifier le passage au feu de l’affirmation de soi et d’autres nourritures masculines. Et c’est justement dans ce contexte d’exigence de faire preuve de masculinité intérieure que surgit le « petit homme » qui dénigre avec ironie la sagesse de l’inconscient.

Ce faisant, il me livre la clé de l’expérience qui m’a été donnée d’entrevoir dans la forêt, et me porte la promesse de l’abondance. Il y avait là non seulement un éclairage de la valeur de la vision spirituelle qui m’était échue lors de ma recherche d’intention existentielle mais aussi une anticipation du travail que je ferai des années plus tard dans l’élaboration du processus Créez votre vie de rêve, avec lequel je partage l’abondance. Je ne sais alors pas quoi dire devant l’énervement du petit homme et son rire destructeur, sauf me répéter les mots de Lao-Tseu pour ne pas me laisser atteindre par cette ironie. J’ai à tort voulu voir dans cet homme la personne à laquelle je me heurtais, qui maniait la même ironie que dans le rêve, avec la même fermeture à la vie intérieure et au sentiment (amérindiens). Ce n’était pas faux car il y a analogie mais le rêve me renvoyait bien sûr directement  au « petit homme » en tant que mon ombre, à « l’homme inférieur » en moi : celui qui doute et qui ricane dans un coin de mon inconscient, loin enfoui tant je l’ai refoulé. C’est lui qui venait me poser problème, auquel je n’avais rien à dire et devant qui je restais coi, apeuré. Pour l’instant, ai-je noté alors dans mon journal.

Près de dix ans après, j’ai été amené à revisiter ce rêve. Cela a été l’occasion de mesurer le chemin parcouru depuis lors. J’ai pensé intituler ce billet « sortir du bois » car c’est finalement ce dont il s’agit, ce à quoi ce rêve m’invitait. Pendant ces dix années, en particulier en m’exposant dans mes blogues et en animant des cercles de rêves, ainsi que d’autres ateliers, je me suis employé à sortir du bois. Cela m’amène à confronter beaucoup plus directement le « petit homme » et maintenant, j’ai de quoi lui répondre. Il ne s’agit pas tellement d’argumenter et de discuter d’ailleurs. Il s’agit simplement d’être soi et de partager les richesses trouvées sur le chemin, car c’est la meilleure façon de les multiplier. Mais il a bien le droit de n’en point vouloir et de rire autant qu’il veut, cela ne prive que lui et nous sert d’indicateur pour reconnaître où est la voie.

Mais alors, demanderez-vous peut-être, où est-il ce chemin qui conduit au cœur de la montagne ? Comment y aller ? Je ne saurais vous le dire même si je dissémine des indices, partout dans ce blogue et en particulier dans cet article, qui pourront être utiles à celles et ceux qui le cherchent. Cependant, je pourrais vous amener dans mes appartements dans le bois et vous n’y verriez que des arbres ordinaires, des pierres et des branchages enchevêtrés. Bien sûr, ce chemin est à l’intérieur, et c’est à chacun(e) de le trouver, dans sa propre intériorité. C’est merveilleux, ainsi ne dépendons-nous jamais de personne pour trouver l’essentiel ! Ne serait-ce pas le fondement de notre liberté la plus fondamentale ?

Les anciens poètes chinois voués au Tao connaissaient eux aussi le chemin. Ainsi Han-Chan dit-il :

J’ai élu domicile au cœur de la montagne :
Sur la voie des oiseaux, il n’est plus trace humaine.
Qu’y-a-t-il autour de mon jardin ?
De vagues rochers qu’embrassent les nues blanches.


Vos commentaires sur mon rêve m’intéresseront car un rêve gagne toujours à être exposé et discuté. Merci !



[1] Vous trouverez ici un article très intéressant sur cette distinction essentielle entre prérationnel et transrationnel : http://developpementintegral.com/post/lerreur-pre-trans-786

17 commentaires:

  1. Un grand merci, Jean, pour ce très précieux partage !

    Répondant à ton invitation à commenter le rêve, je dirai que l’expression "trouver accès au cœur de la montagne" m’a fait penser –je vais te surprendre... ;-) – à l’hexagramme 52 du Yi King. Je cite :

    52. Ken / L'Immobilisation, la Montagne

    Le Jugement

    IMMOBILISATION DU DOS si bien qu'il ne sent plus son corps.
    Il entre dans sa cour et ne voit plus les siens.
    Pas de blâme.
    Le vrai repos est celui où l'homme s'arrête quand le moment est venu de s'arrêter et se meut quand le moment est venu de se mouvoir. Ainsi le repos et le mouvement sont en harmonie avec les exigences du temps et l'on voit alors naître la lumière et la vie. L'hexagramme est la fin et le commencement de tout mouvement. Le dos est désigné parce qu'il est le siège de tous les cordons nerveux qui transmettent le mouvement. Lorsqu'on fait cesser le mouvement de ces nerfs dorsaux, on voit en quelque sorte le moi s'évanouir avec son inquiétude. Quand l'homme est parvenu à une telle paix intérieure il peut se tourner vers le monde extérieur. Il ne perçoit plus en lui le combat et le tumulte des êtres individuels et possède en conséquence le calme nécessaire pour comprendre les grandes lois des phénomènes de l'univers et y conformer sa conduite. Celui qui agit à partir d'une telle profondeur ne commet pas de fautes.
    ------------------------
    Neuf en haut signifie :
    Immobilisation magnanime.
    Fortune.
    Ici est exprimé l'achèvement de l'effort vers le calme. Non seulement on est en paix en ce qui concerne les détails, les choses comprises dans un cercle restreint, mais un renoncement général procure la paix dans tous les domaines et une heureuse fortune dans tous les actes.

    (voir ici : http://wengu.tartarie.com/wg/wengu.php?l=Yijing&lang=fr&no=52)

    Le neuf en haut est le seul trait maître de l’hexagramme la Montagne. Il en exprime en quelque sorte le cœur, le cœur de la Montagne.
    Le texte du jugement parle de l’évanouissement du moi avec son inquiétude et de la fin du combat et du tumulte des êtres individuels qui amène à comprendre les grandes lois des phénomènes de l’univers et à y conformer sa conduite.
    Le rapprochement avec le contenu de ton rêve me semble assez facile à faire. L’homme verbomoteur, par exemple, serait un bon représentant de l’in-quiétude du moi. Ta découverte de la structure toute pleine de sens cachée sous les apparences banales correspondrait bien à la découverte des grandes lois de l’univers dont parle le texte du Yi King, etc.
    Je trouve que ton rêve éclaire le texte du Yi King, et réciproquement. :-)

    Les quenelles m’ont également un peu parlé. On peut facilement entendre les "queues en elles". Ce qui pourrait suggérer qu’il s’agit désormais pour le rêveur, après cette découverte "initiatique" du sens profond caché sous les apparences banales et chaotiques, d’unir en lui le masculin et le féminin de l’Être, de mettre le Lingam dans la Yoni*, de nourrir et de faire croître l’androgyne intérieur qui vient peut-être de naître en lui (ou vient de franchir une nouvelle étape, un nouveau seuil en lui). D’unir en lui les (points de vue, etc.) opposés et complémentaires.

    Voilà ce qui m’est venu à l’esprit pour le moment à propos de ce rêve que tu as déjà très pertinemment interprété par ailleurs.

    Amezeg

    * à quoi ressemblent les statuettes indiennes du rêve ?

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    1. Merci Amezeg ! Tu m'as bien surpris, et éclairé, avec cet hexagramme 52 qui amène donc une compréhension encore plus profonde du rêve. Je crois que l'immobilité du dos renvoie à l'exercice de la méditation, dans laquelle le dos est immobilisé dans la verticalité qui relie la terre et le ciel. Il se trouve que l'une des étapes de la pratique de la méditation consiste justement en s'enraciner dans l'image de la montagne. visant ainsi à l'immobilité...

      Il y a eu une synchronicité très souriante autour de tout cela. Juste avant de tirer le Yi King aujourd'hui pour demander une orientation pour ma petite vie, je me demandais quel hexagramme serait produit par le 52 La Montagne avec le 9 en haut (que tu cites) mutable. Et comme par un souriant hasard, c'est justement cet hexagramme 15, l'Humilité, qui est sorti de mon tirage ! :-)

      Merci pour ton interprétation des quenelles, qui amène aussi un éclairage fort intéressant au rêve. Quant aux statuettes indiennes, je n'en ai aucun souvenir mais j'aime penser qu'il y avait là des Shiva dansant, et peut-être le Shiva et la Shakti en union. Mais ce n'est là que mon imagination près de 10 ans après le rêve...

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    2. Très souriante synchronicité, en effet. :-) Tu fus bien inspiré de chercher à savoir ce que produit le 52 lorsque mute le 9 en haut.
      Et l’on peut remarquer avec intérêt que l’hexagramme 15, l’Humilité, le seul des 64 hexagrammes du Yi King dont tous les traits sont "favorables" évoque tout naturellement une situation propre à favoriser une vie d’abondance, celle du cœur avant toute autre : « La loi de la terre est de changer ce qui est plein et d'affluer vers ce qui est humble. Les hautes montagnes sont usées par les eaux, et les vallées, comblées. La loi des puissances du destin est d'entamer ce qui est plein et de dispenser le bonheur à l'humble. », précise le commentaire du Jugement.

      Merci d’avoir répondu à ma question sur les statuettes, bien que tu n’en aies pas de souvenir précis.
      Le contraste entre les Indes Orientales évoquées dans le rêve par ces statuettes et les Indes Occidentales réprésentées par l’Amérique et les amérindiens retient mon attention. Les statuettes indiennes placées sur le bord du lac semblent garder les eaux profondes d’une spiritualité toute pleine d’images profuses et de riches doctrines variées comme l’est la spiritualité en Inde, tandis que la mention de la vision amérindienne « ...vous savez ce que racontent les Amérindiens par ici ? Ils disent que celui qui trouvera accès au cœur de la montagne vivra une vie d’abondance ! » évoque une spiritualité plus dépouillée de formes profuses. Cela ferait-il allusion à ton cheminement personnel, d’européen d’origine, entre ces deux tendances ou voies d’accès à la spiritualité ? Ou quoi d’autre encore, qui ne me vient pas à l’esprit pour le moment ?

      Amezeg

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    3. remarque pertinente d'Amezeg concernant l'Inde et l'Amérique. Quel lien y - a t -il entre les 2 religions pour apparaitre dans un même rêve ? que signifie le fait de ne pas pouvoir voir les statues quand tu es debout ?

      X

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    4. Oui, Amezeg, il y a dans cette dualité entre les Indes orientales et les Indes occidentales une allusion directe au mouvement spirituel dans lequel je me situe, que l'on appelle Dharma-Gaïa car il conjoint la méditation et le chamanisme. Dans mon cas, c'est bien sûr Jung qui fait un pont et offre un axe d'intégration de ces approches apparemment opposées, mais qui dialoguent très bien.

      Quant à comprendre pourquoi je me peux voir les statues debout, X, je l'explique dans le texte de l'article avec la petite histoire du rabbin. Il y a des choses q'on ne peut voir que dans la proximité avec l'humus...

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    5. ok et c'est surement vrai d'ailleurs, je ne m'étais pas assez baissé sur le texte pour voir cette sage partie...d'ailleurs dans le film Predator 1 Dutch n'arrivera a vaincre l'alien que lorsqu'il se couchera dans l'humus originel , affirmant par la même sa proximité ou fusion avec la Terre sous les racines d'un arbre millénaire. Attention scène culte :
      https://www.youtube.com/watch?v=ktVqsBgOvBI

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  2. "Au-delà du croire et du savoir, la voie qui s’ouvre est celle du non-savoir dans l’ouverture au mystère, pour danser avec lui puisque le mystère est vivant."

    Encore un texte magnifique Jean! Merci beaucoup pour tes mots inspirants qui viennent me conforter et m'encourager à poursuivre mon propre chemin intérieur... :)

    Catherine R. xx

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    1. Merci Catherine ! Oui, tout cela n'a de valeur que s'il encourage les personnes qui me lisent à suivre leur propre chemin intérieur...

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  3. Oui, c'est un très très beau texte dans lequel il y a beaucoup à méditer...

    Il n'y a pas grand-chose à y ajouter, sinon, peut-être que l'état de la nature extérieure est le parfait "reflet" de l'état de notre nature intérieure...
    Et que si pollution il y a , c'est parce que, au départ, il y a pollution "psychique"...
    (les écologistes du roman me font bien rire, d'ailleurs, car en "tagguant" leur slogan plein de bons sentiments, ils ne se rendent pas compte qu'ils ajoutent, ce faisant, un peu de "saleté" dans le monde...).

    Et donc, puisque les deux "natures" se répondent, ce que les arbres "soufflent" si joliment au coeur de celui qui les écoute ...est à double sens :
    sous notre "nature humaine" si souillée...notre "nature véritable" est inviolée ...et reprendra, tôt ou tard, ses droits...

    Y a-t-il plus beau message ? :-)

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    1. Merci chère Licorne. Je suis bien d'accord en ce qui concerne ce reflet entre l'intérieur et l'extérieur. Et en effet, je crois qu'il faut bien entendre le double message des arbres (merci de le souligner), c'est aussi comme cela que je l'ai compris : notre nature véritable, qui n'est pas séparée du Royaume, est inviolée. Alleluia ! :-)

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  4. La Terre est un jardin : ouf ! l'Inconscient aurait pu dire une entreprise ou une grange...beaucoup de gens ne comprendront jamais que la Terre n'est pas un lieu crée pour une certaine forme de productivité économique ou même spirituelle obligatoire, il s'agit simplement d'un Jardin, un endroit de détente, de jeu, de réflexion entre amis. Voir le Jardin d'Epicure et le fameux "cultiver son propre jardin" de Voltaire.

    Tout pousse dans un jardin, les bonnes et mauvaise plantes. Les problèmes viennent du fait que certains prennent leur jardin pour un zone de forage pétrolier ou alors veulent des jardins taillés au carré et d'autres des jardins
    sauvages. Mon coeur balance.

    La Nature est inviolée et reprendra ses droits :
    A l'échelle cosmique, l'homme n'est rien et l'industrialisation une mode qui passera, les nouvelles générations sont de plus en plus écolos...

    Notre véritable nature est inviolable, dans le sommeil et la mort ou est le monde, notre sombre Histoire, la souffrance, la contamination ? tout disparait ou disparaitra. Notre véritable nature est aussi notre ultime refuge, un espace de paix er de silence comparable a un jardin ou à la nature cité dans le rêve. Le problème c'est que pour y aller il faut pénétrer dans la montagne - parcours spirituel - mais cela ne suffit pas, il faut aller jusqu'au coeur or un homme cravaté, affairé, qui se préoccupe encore du monde n'y arrivera jamais.

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  5. Notre véritable nature : la conscience absolue ou vrai Soi que nous sommes est comme un jardin c'est a dire un Espace d'Acceuil, une fenêtre ouverte.
    Prenons un exemple simple : quand nous nous reveillons le matin, nous créons l'Espace et le Monde. Dès que je suis, le monde apparait, si je ne suis plus alors le monde disparait. Le monde apparait grace a la super pensée " je suis " crée par le Soi qui veut se matérialiser et être.

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  6. pour les quenelles faudrait demander a Dieudo, je vois que lui pour ;)))

    X

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  7. Je veux pas vous rendre triste mais je vais surement mourir bientôt, j'ai chopé une maladie rare, je sais pas quoi , peut être Ebola ou la maladie du singe vert, mes rêves parlent que d'hospitaux, j'étais dans un hosto et c'est moi qui poussait le chariot avec une femme docteur allongée, je traverse différente pièces on me salue genre c'est moi le doc bref c'est le monde a l'envers, tout part en free style, même Abraxas est mortel mes amis, c'est honteux. J'irai surement au paradis ou en enfer, je vous garde une place sachant qu'il vaut mieux aller en enfer toutes les cochonnes seront la-bas. Adieu Jean. Amezeg, ta magie satanique aura eu raison de moi !

    https://www.youtube.com/watch?v=RLHIMg4aHgw
    X

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    1. Je suis désolé d'entendre que même Abraxas est mortel. Ces rêves mériteraient d'être considérés en profondeur pour savoir ce que le Soi veut dire par là. Les commentaires ne sont pas le lieu pour ça mais il est toujours possible de me contacter pour en parler par la boîte de messages privés. J'aime beaucoup ton humour, Terminator. Je préfère cependant https://www.youtube.com/watch?v=kgNwfmFhDlI ;-)

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    2. Je te remercie de ta compassion Jean mais je n'ai plus bq de forces pour écrire...ahhh j'ai mal..je pense que le Soi veut dire qu'Amezeg est louche, selon mon expérience son silence en dit long, je dirais même que son silence est éloquence, il doit bien rire dans sa barbichette donc le coupable de ma maladie me semble assez facile a identifié cette fois ci...le Soi m'a dit en rêve un jour " Amozegé Naganahué chiché " donc tout de suite j'ai fait le rapprochement avec Lucifer, logique. Excuses moi de penser comme un indien chaman mais la maladie est causé par un envoutement, une personne méchante te veut du mal, la suite est facile a déduire, il faut faire un sacrifice humain en général pour te purifier.

      https://www.youtube.com/watch?v=DHV5iyz1N3Y

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  8. Parfois j'aime les rêves, d'ailleurs je ne m'intéresse plus qu'aux beaux rêves, les autres je les jette car non seulement j'ai une mémoire hyper sélective mais des gouts de luxe, il semble que dans la Nature on soit assez libre de marcher a la vitesse qu'on veut et avec la tenue qu'on souhaite... enfin pour moi en tout cas.

    Je suis étudiant a la fac surement, je dois faire un examen mais je ne comprends rien, je n'ai même pas entendu le sujet. Je regarde alors ma copie et je vois une écriture parfaite ainsi que des dessins extrêmement stylisés. La prof s'approche de moi et me félicite.

    Mon épouse me donne 10000 et il est question de me donner 200000...

    Bon week end les cocos...

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